Alors que les annonces et projets d'envergure se multiplient, la France et l'Europe se dotent d'instances et d'outils capables d'accompagner, dans la durée, la montée en puissance de la filière. Deux premiers exemples : l'IPCEI et le Conseil National de l'Hydrogène.
Ce n'était qu'une question de temps. Après l'Airbus des batteries, l'équivalent dans l'hydrogène est donc sur les rails. C'est ce qu'on appelle dans le jargon de la Commission un IPCEI (un projet commun d'intérêt européen).
Initié par l'Allemagne, et annoncé par le ministre fédéral de l'Economie, Peter Altmaier, ce projet a été ratifié par 22 pays d'Europe (dont la France) et la Norvège. Dans leur déclaration d'intention, ces pays déclarent leur volonté d'investir en commun et de développer en particulier la chaîne de valeur autour de l'hydrogène vert. "Nous voulons que nos projets européens communs et nos investissements conjoints dans les technologies de l'hydrogène fassent de l'Europe le numéro 1 mondial", a commenté Peter Altmaier. En écho, Margrethe Vestager, Commissaire en charge de la concurrence, souligne qu'"aucun pays ni aucune entreprise ne peut le faire seul(e)" et qu'un "investissement considérable, à la fois public et privé reste à faire", de même qu'une "collaboration sans frontières". "En tant que pierre angulaire du Green Deal européen, l'hydrogène renouvelable et à faible émission de carbone favorisera non seulement la conversion de notre secteur industriel à l'énergie verte, mais offrira également des opportunités commerciales importantes aux entreprises de l'UE", a commenté pour sa part Thierry Breton, Commissaire en charge du marché intérieur. La Présidente de l’Union Européenne, Ursula von den Leyen, s’est également exprimée sur ce projet à travers une vidéo de promotion.
Les détails de cet IPCEI n'ont pas encore été communiqués. Toutefois, la France y apporte son soutien. Sur son site, le ministère de l’Economie précise que ce Projet Important d’Intérêt Européen Commun (PIIEC/IPCEI) sur l’hydrogène, à l’instar du projet européen sur les batteries, pourra par exemple soutenir la R&D et l’industrialisation d’électrolyseurs pour produire de l’hydrogène décarboné et déployer ces solutions dans l’industrie. Ce projet pourra également concerner des projets de « giga factory » d’électrolyseurs de nouvelles générations, ainsi que l’industrialisation d’autres briques technologiques (piles à combustible, réservoirs, matériaux…), dans une logique d’intégration de la chaîne de valeur au niveau européen. La France réservera une dotation financière exceptionnelle de 1,5 Md€ dans le cadre de cette action. Au niveau du calendrier, Bercy rappelle que les échanges techniques entre les filières industrielles et les services de l’État ont débuté dès septembre 2020 afin d’organiser la présentation des dossiers des candidats en vue d’une notification du projet IPCEI d’ici fin 2021.
Tout comme dans les batteries, la France entend faire preuve d’initiative. A travers le CSF (Comité Stratégie de Filière) Automobile, elle porte par exemple le projet Rainbow Unhycorn. L'ambition du projet est de déployer des dizaines de milliers d'utilitaires H2 dans une vingtaine de villes européennes et les infrastructures qui vont avec. L’hexagone compte plusieurs acteurs de premier plan dont Symbio (Faurecia/Michelin) et Plastic Omnium. De plus, les deux constructeurs nationaux sont également engagés dans la course. Le groupe PSA s'apprête à lancer d'ici la fin 2021 des utilitaires à hydrogène, grâce à Opel. Et Renault a décidé de s’associer avec PlugPower pour apporter des solutions clés en main sur ce même segment. L’Europe a besoin de faire émerger des champions, au moment où des acteurs asiatiques (Hyundai et Toyota) essaient de valoriser sur le vieux continent leur savoir-faire dans le domaine des piles à combustible.
Comme cela a été prévu dans le cadre du plan de relance, le gouvernement a donc annoncé aujourd'hui la composition du Conseil national de l'hydrogène. Cette instance aura pour rôle de structurer les échanges entre l’Etat et les parties prenantes de la mise en œuvre de la stratégie H2, en particulier les filières industrielles, et de mesurer le bon déroulement des actions prévues pour identifier, le cas échéant, les éventuels freins.
Philippe Boucly, président de France Hydrogène ; Laurent Carme, directeur général de McPhy ; Frédéric Chalmin, directeur général de KemOne, représentant le Comité Stratégique de Filière Chimie & Matériaux ; Philippe Darmayan, président d’ArcelorMittal France, représentant le Comité Stratégique de Filière Mines et Métallurgie ; Jean-Brice Dumont, directeur exécutif de l’ingénierie et membre du comité exécutif d’Airbus, représentant le Comité Stratégique de Filière Aéronautique ; Gabrielle Gauthey, directrice générale du Carbon Neutrality Business de Total ; Hervé Guillou, président du Comité Stratégique de Filière Industriels de la Mer ; François Jacq, administrateur Général du CEA ; Patrick Koller, directeur Général de Faurecia, représentant le Comité Stratégique de Filière Automobile ; Jean-Bernard Lévy, président-directeur général d’EDF ; Catherine MacGregor, directrice générale d’Engie ; Benoît Potier, président-directeur général d’Air Liquide et co-président du Conseil mondial de l’hydrogène ; Henri Poupart-Lafarge, président-directeur général d’Alstom et représentant le Comité Stratégique de Filière Ferroviaire ; Alexandre Saubot, président de France Industrie ; Guy Sidos, président-directeur général de Vicat et représentant le Comité Stratégique de Filière Construction ; Pierre Verzat, président de Syntec ingénierie.
La coordination des industriels membres du Conseil national de l’hydrogène sera assurée via une co-présidence entre Patrick Koller et Benoit Potier. Le secrétariat du conseil sera assuré par le coordinateur interministériel qui sera prochainement nommé, en lien avec les délégués permanents du comité stratégique de filière Nouveaux systèmes énergétiques et de France Hydrogène. La première réunion du Conseil national de l’hydrogène devait se tenir en janvier, afin de faire un premier bilan de la mise en œuvre de la Stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné et de faire un point d’étape sur la construction et le calendrier du PIIEC.