Basée dans la Drôme, la société vient de procéder à une nouvelle levée de fonds pour un montant de 11 millions d’euros. Elle fait le point sur ses activités.
Nous avions déjà eu une levée de fonds de 2,7 millions d’euros à l’été 2015 avec des partenaires historiques que sont Aliad (Air Liquide), Demeter, GO Capital et Arkéa. Dans le cadre d’un nouveau tour de table, géré par Bpifrance dans le cadre du Fonds PSIM (Programme de soutien à l’innovation majeure) qui est lié au Programme d’Investissements d’Avenir, les mêmes partenaires ont investi de nouveau, avec en plus la participation d’AP Ventures, Kouros et Normandie Participations. C’est une reconnaissance de notre concept.
Nous avons développé une électrolyse de l’eau fractionnée pour produire de l’hydrogène décarboné. En principe, dans le cadre d’une électrolyse classique, le courant électrique permet de libérer en même temps de l’oxygène et de l’hydrogène. Notre concept est différent. Dans un premier temps, nous réalisons l’électrolyse de l’eau en libérant seulement l’oxygène. L’hydrogène reste piégé sous forme de protons dans l’eau. Nous le libérons ensuite sans apport énergétique grâce à l’ajout dans l’eau d’un sel de zinc. Cette alternative permet de simplifier l’électrolyse, mais aussi d’éviter que les gaz ne se recombinent. Ainsi notre procédé fractionné sous pression évite des étapes de purification de l’hydrogène vis-à-vis de l’oxygène et aussi de séchage de l’humidité résiduelle. L’autre intérêt est d’avoir des machines plus compactes, grâce à une fonction intégrée de compression électrochimique. Notre technologie permet d’avoir une pression d’équilibre très élevée, de l’ordre de 350 bars en laboratoire, et 200 bars sur nos premières machines. L’approche d’Ergosup lui a valu d’être lauréat à trois reprises du concours mondial de l’innovation, en 2014, 2015 puis en 2017.
Nous avons démarré en 2012 cette démarche innovante pour la production d’hydrogène par électrolyse sous pression. Nous avons ressenti à partir de 2014 un intérêt croissant pour l’hydrogène avec l’entrée en bourse de McPhy, puis en 2015 avec le positionnement fort d’Air Liquide. Ces deux dernières années, les acteurs de la filière hydrogène bénéficient toujours du soutien de l’Europe et aussi aujourd’hui de la France, même si ce dernier est plus modeste. Au-delà des soutiens publics, il est important de constater des investissements industriels nouveaux comme ceux d’EDF ou ENGIE dans le secteur.
Ergosup achève une première étape centrée sur le développement de la technologie. Nous avons une équipe de 20 personnes, qui sont essentiellement des ingénieurs avec une compétence en électrochimie et en mécanique haute pression. Il va y a voir 10 recrutements de plus en 2019, avec des techniciens, mais aussi des chefs de projet et des commerciaux. Nous opérons une transition pour la mise sur le marché de nos premiers produits. Nous avons développé un premier système pour de production d’hydrogène pour un usage de gaz industriel à une pression de 120 bars. Nous proposons des générateurs d’hydrogène qui peuvent libérer à la demande de l’hydrogène décarboné. Nous visons de monter la pression de 200 à 350 bars, l’objectif étant de se rapprocher des 700 bars. Aujourd’hui, nous concevons et assemblons des machines de démonstration qui seront implantés sur des « sites clients amis ».
Oui. Nous avons mené un travail avec Pragma Industries pour collaborer sur une station permettant d’alimenter une flotte de vélos à hydrogène. Nous étions ensemble au CES de Las Vegas. La volonté est de développer à partir de la même base technologique des systèmes décentralisés de ravitaillement au plus près des clients, pour une production de 1 puis 5 à 40 kg d’hydrogène par jour. Par ailleurs, nous avons aussi un projet dans le domaine des drones à hydrogène, en partenariat avec la société toulousaine Delair. L’objectif est de fournir de l’hydrogène à 300 bars sous la forme de cylindres composites légers qui se remplissent sur la station puis se connectent sur le drone. La valeur ajoutée de l’hydrogène est importante pour les drones car il permet d’augmenter par un facteur 4 l’autonomie de vol.
Dans les 3 ans, nous allons procéder à de l’assemblage d’électrolyseurs avec des partenaires sous-traitants et en interne pour faire de la petite série. Notre métier sera de concevoir, fabriquer et vendre ces appareils. Pour des petits systèmes, nous pourrons aller jusqu’à livraison de stations intégrées. Sinon, le cœur de l’activité reste l’électrolyse. Au début, Ergosup ciblera des systèmes de capacité petite à moyenne de l’ordre de 1 à 100 kg/j, avec l’ambition de monter au maximum en pression sans compresseur mécanique : c’est un positionnement spécifique, même si d’autres acteurs en Europe et aux États-Unis travaillent également sur ce créneau.
Interview réalisée par Laurent Meillaud